Coaching Humain vs IA : quand l’expérience dépasse le débat

Et si, au lieu de parler de l’IA dans le coaching, on osait la vivre ?

C’est le pari que nous avons fait à l’occasion de l’International Coaching Week 2025 : organiser une table ronde fondée sur une expérience réelle, incarnée, partagée. Une même cliente, Annabelle, s’est prêtée à l’exercice : trois séances de coaching sur un même sujet, avec trois modalités différentes.

  1. Une séance 1 avec une IA « généraliste ».
  2. Une séance 2 avec un coach humain, Edwige Giron-Fleckinger certifiée PCC
  3. Une séance 3 avec une IA « généraliste », programmée avec les principes de l’ICF.

L’objectif ? Comparer, ressentir, réfléchir ensemble à cette question qui traverse notre profession : « L’IA peut-elle coacher ? »

J’ai eu le plaisir d’animer cette table ronde avec les témoignages d’Edwige et d’Annabelle.

Table ronde coaching

Trois séances, trois univers

Avec Edwige, la séance est fluide, rythmée par l’écoute, les reformulations sensibles, les silences en présence. La relation se construit dans l’instant. Il y a de l’humanité, de la nuance, une forme d’intelligence de l’instant présent. Pour la cliente, la séance fut vivante, introspective, profondément humaine.

Avec l’IA, le ressenti est tout autre. La première expérience se termine pour la cliente par beaucoup de frustration, des suggestions prémâchées, et peu d’écoute réelle.  L’effet est celui d’un GPS qui parle trop : on n’écoute plus, on subit.

La seconde expérience avec l’IA, entraînée sur les principes du coaching et les 8 compétences de l’ICF, montre des progrès : structure, langage, rythme. Mais l’expérience reste désincarnée, en surface. Pas de présence. Pas de ressenti. Pas de lien.

« Ce n’était pas du coaching, c’était au mieux du monotoring » dira Annabelle, en évoquant cette impression de recevoir des solutions toutes faites au lieu d’explorer ses propres réponses.

Quand l’IA bute sur l’essence du coaching

Ce que cette expérimentation met en lumière, c’est une évidence que l’on pressentait sans l’avoir formalisée : le coaching ne se résume pas à une série de questions puissantes.
Il s’agit d’une relation d’accompagnement, construite sur l’alliance, la co-création, la sécurité émotionnelle. Ce sont les silences, les hésitations, les regards, les intuitions partagées qui façonnent la transformation.

Même les IA les plus avancées ne perçoivent ni les signaux faibles, ni les non-dits, ni les micro-émotions. Elles excellent dans le questionnement logique. Mais elles échouent à sentir, à ressentir, à ajuster. Et c’est là, précisément, que naît la puissance du coaching.

Les 8 compétences ICF passées au crible

Nous avons analysé l’expérience à la lumière des 8 compétences fondamentales du coaching selon l’ICF (International Coach Fédération).
Le résultat est clair : si certaines compétences sont simulables par une IA, aucune ne peut aujourd’hui être incarnée à 100 %. Voici pourquoi :

  1. Respecter l’éthique et les lignes directrices :

    → L’IA peut connaître la charte ICF, mais ne la vit pas. Elle peut produire des conseils, ce que nous ne faisons pas en coaching. Elle ne gère pas la confidentialité des données (RGPD), ni les consentements éclairés. Vigilance !

  2. Incarner un état d’esprit coach :

    → L’IA agit selon des scripts. Elle ne co-construit pas la relation. Elle ne pose pas de questions issues de l’ici-et-maintenant, ni ne navigue dans l’inconnu avec le client.

  3. Créer un lien de confiance et de sécurité :

    → Pas d’attachement, pas de regard, pas d’émotion perçue. L’IA ne capte pas les silences habités, ni les micro-variations émotionnelles. La confiance est mimée, jamais vécue.

  4. Établir et maintenir le contrat de coaching :

    → L’IA suit les instructions données, mais ne clarifie pas réellement l’objectif du client, ni ne l’aide à poser des indicateurs ajustés à son contexte.

  5. Être pleinement présent :

    → L’IA est disponible, oui. Mais elle ne « ressent » pas. Elle ne s’ajuste pas aux émotions, aux hésitations, aux non-dits. Elle ne sent pas quand approfondir ou ralentir.

  6. Écouter activement :

    → L’IA reformule… trop bien. Elle transforme les mots du client au lieu de les respecter. Elle n’écoute pas ce qui est en creux, ce qui cherche à naître dans l’espace du silence.

  7. Susciter des prises de conscience :

    → L’IA peut poser des questions puissantes, mais pas au bon moment. Elle ne capte pas les signaux faibles. Elle ne rebondit pas sur une émotion, un frisson dans la voix. Et elle ne confronte jamais.

  8. Faciliter la croissance du client :

    → Pas de plan d’action véritable. Pas de vision systémique. Pas d’allers-retours avec l’écologie du système du client. Et surtout : aucune intuition pour sentir le moment juste du changement.

8 compétences ICF

L’IA : un excellent pêcheur, mais pas un mentor

Nous avons utilisé cette métaphore simple pour éclairer notre réflexion :

  • L’IA est un pêcheur : elle donne des solutions, des phrases prêtes à l’emploi.
  • Le coach humain apprend à son client à construire sa canne à peche pour attraper ses poissons. Il le rend autonome, il lui apprend à trouver sa méthode, son rythme, son espace d’apprentissage.

Le coaching, ce n’est pas faire à la place de. C’est permettre à l’autre de devenir capable de.

Pecheur canne à pêche

Et demain ? Le coach augmenté, pas remplacé

Face à cela, faut-il rejeter l’IA ? Certainement pas.
Nous pensons au contraire que l’IA peut être un co-outil, utile à certaines conditions :

  • Transparence sur son usage (notamment dans la relation coach-client).
  • Respect de la confidentialité des données.
  • Connaissance des biais et des limites de l’outil.
  • Usage complémentaire, jamais substitutif.

Un coaching sans coach, ce n’est pas du coaching.
Mais un coach ou un client qui sait utiliser l’IA de manière critique, transforme l’IA en un coach augmenté.

Le coach reste irremplaçable, parce qu’il est incarné.

En guise de mot de la fin…

Cette table ronde nous a permis d’explorer, de débattre, de rêver aussi.
Le coaching est un art vivant.
Ce n’est pas qu’un savoir-faire. C’est aussi un savoir-être.
Et si l’IA peut soutenir, accompagner, enrichir… elle ne remplace ni la main tendue, ni le silence fécond, ni le « je suis là pour toi » incarné d’un coach en présence.

Pour demain, nous envisageons de nouvelles expérimentations, une veille active sur les outils, et une posture de vigilance auprès de nos clients sur les usages de l’IA dans notre profession.

L’IA ne signe pas la fin du coaching. Elle signe peut-être le début d’un nouveau dialogue entre intelligence technique… et intelligence humaine.

Le chemin à venir est à inventer, ensemble.

Main IA Humain

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